Le Tarn a été un grand département industriel renommé pour ses lainages et ses cuirs. Des dizaines d’usines employaient une abondante main d’oeuvre qui rendait la région prospère et vivante. La tyrannie de la modernité, l’invasion du synthétique et la concurrence des produits bon marché (et de médiocre qualité) en provenance d’Asie ont tué progressivement les usines. Les unes après les autres elle ont fermé, les gens sont partis faute de travail et le savoir faire qui faisait la fierté des ouvriers n’est plus maîtrisé que par quelques anciens.
Graulhet était le centre de l’industrie du cuir et fut en son temps « capitale de la basane ». Il ne survit péniblement que quelques 30 des 116 mégisseries qui fabriquaient des cuirs de qualité supérieure, de ces cuirs qui dureront une vie. La plupart des bâtiments abandonnés de ce fait ont été reconvertis de diverses façons ou tombent en ruine.
Heureusement certains bâtiments ont survécu avec leurs façades de lamelles de bois analogues à celles des séchoirs à tabac. Ici ce n’est pas le tabac qu’on séchait mais le cuir.
Un des bâtiments abandonnés a été racheté et rendu à la vie par une équipe d’artistes aussi originaux que passionnés les « Plasticiens Volants« .
Les Plasticiens Volants fabriquent ces immenses structures gonflables qui émerveillent les visiteurs des carnavals et autres fêtes. Ce sont à la fois des créateurs inspirés et des artisans minutieux qui prêtent attention au moindre détail, cherchent sans relâche à perfectionner leurs techniques et leurs produits.
La taille de leurs réalisations exigeait des salles immenses et hautes de plafond. La vieille usine et ses dépendances plus récentes le leur a fourni…. bien qu’ils aient dû supprimer un étage pour augmenter la hauteur de la plus grande des salles.
Ils se sont installés dans les bâtiments sans les moderniser ce qui permet d’admirer ça et là les vestiges des machines et autres souffleries qui étaient partie intégrante de la mégisserie. La robustesse de ces tuyaux , de ces poulies et de ces vannes leur permettrait de défier les siècles.
Accompagnez les Plasticiens?
Tout commence par des maquettes en plasticine. On recouvrira la maquette de papier de façon à tracer les lignes qui permettront de restituer la forme en découpant les pièces de tissu.
Ce tissu est un tissu plastique qui emprisonnera l’air et l’hélium et doit pouvoir résister aux changements de pression et de températures. D’immenses fermetures éclair permettront de pénétrer dans la structure pour y installer les « haubans » et autres cloisons intermédiaires qui maintiendront la forme en place…. infrastructure sans laquelle l’air transformerait toutes leurs créations en boules rondes.. Et on a incorporé à l’ensemble des ventilateurs qui assureront l’entrée d’air et sa pression. (je simplifie tout cela bien que l’on nous ait tout expliqué en détail.)
Le tissu sera peint en fonction de l’effet recherché.
L’oiseau a l’air littéralement de sortir de son trou dans le rocher.
Et puis on passe à la couture. L’immensité des pièces à coudre est telle que nos tables seraient bien en peine de les contenir. On a donc eu l’idée astucieuse d’installer les machines dans une fosse et c’est le plancher de la pièce qui sert de table de travail. Inutile de dire que ça m’a donné des idées bien que ma maison ne se prête guère à leur réalisation. ….Mais si je me faisais construire un atelier, je ne dis pas!
Une fois toutes les pièces solidement assemblées on gonfle. Nous avons pu assister au gonflage d’essai d’un Leviathan marin qui , tout plat lorsque nous sommes arrivés a fini par faire plusieurs mètres de haut pour être redevenu tout plat avant notre départ. Ce gonflage d’essai permet de vérifier l’étanchéité, la vitesse de gonflage etc…
Comme la plupart des structures serviront de théâtre à un sketch on fabrique les personnages et les costumes qui illustreront le sketch. Celui ci par exemple sera placé tout en haut de la montagne.
Les personnages se doivent d’être très légers parce qu’on les déplacera au moyen d’une longue perche. Là aussi il faut créer le personnage au moyen de papier journal collé sur une forme avec de la colle à papier peint. Mes enfants fabriquaient des marionnettes avec cette technique. On collait le papier sur un bas empli de sable et lorsque tout était sec on vidait le bas…Mais bien sûr nous ne savions pas faire des personnages aussi vivants que celui ci. La maquette séchée sera peinte pour donner la vie au visage.
Les acteurs répètent les gestes qui doivent illustrer le sketch, là aussi tout doit être parfait.
Nous sommes partis à regret après cette journée enchantée au royaume des Plasticiens Volants.
Superbe, merci beaucoup
Vraiment surprenant. Quel travail remarquable. Merci pour ce reportage.
Isatis
J’avais hésité à publier cet article qui n’est pas tout à fait dans le sujet du blog. Par ailleurs ces gens ont les mêmes outils que nous : tissu et machine à coudre et ça m’a semblé intéressant de montrer un autre aspect de l’utilisation de nos matériaux. Et ne rêvons-nous pas toutes de faire du 3D…. celui là est génial et nous pourrions certainement utiliser leur technique de report des patrons sur le tissu pour obtenir le relief.
bjr denise,
ah ! je vois que contrairement à moi, tu as bien écouté les explications ; bravo pour ce reportage
et partage
J’adore savoir comment les gens font les choses et ce qui les a amenés à les faire… et d’une certaine façon ce travail reste dans mon domaine de compétence
Etonnant et intéressant ! Merci pour ce reportage passionnant.